Synthèse tribunal – octobre

RETOUR SUR LES COMPARUTIONS IMMEDIATES : OCTOBRE 2019 – synthèse mensuelle

Une fois de plus, ce mois-ci aura été synonyme de répression judiciaire.

Comme nous l’avions anticipé avant l’été, un certain nombre de procès de personnes arrêtées dans le cadre du mouvement des GJ n’ont pas pu se tenir durant la période estivale. Et oui, il a bien fallu que la bourgeoisie judiciaire prenne des vacances et aille se dorer la pilule sur la côte pour oublier la dureté de son travail quotidien : reproduire un ordre social qui juge et condamne les prolos, et qui réprime toutes celles et ceux qui n’ont pour seul pouvoir que la force du nombre et le sens de la révolte.

D’autres procès, sur lesquels nous revenons ici, ont fait suite à des interpellations intervenues lors des manifestations qui se sont déroulées depuis la rentrée de septembre.

Voici donc un bref essai de synthèse mensuelle des procès ayant eu lieu durant le mois d’octobre 2019, auxquels nous avons pu assister[1].

L’objectif de notre démarche n’est pas de revenir nommément ni exhaustivement sur les procès mais bien de percevoir les grandes lignes de la dynamique répressive propre à l’appareil judiciaire. Voilà pourquoi vous trouverez dans cet essai de synthèse non pas des noms, des dates ou bien des détails précis sur les procès, mais plutôt des éléments de procédure récurrents et donc identifiables qui peuvent nous permettre de mieux nous défendre, collectivement.

  • Une dizaine de personnes ont comparu ce mois-ci.

 

  • Les chefs d’inculpation (faits reprochés) : rien ne change depuis le début du mouvement et de sa répression. Les personnes arrêtées en manif sont poursuivies pour des motifs récurrents tels que « participation à un groupement », « attroupement en vue de commettre des actes de violence et de dégradation », « dissimulation du visage », « violence sur personne dépositaire de l’autorité publique (pdap) ». Parfois accompagnés de « rébellion » ou de « refus d’ouvrir son téléphone portable », ces chefs d’accusation sont des outils aux mains de la justice pour une répression qui tend à se standardiser. Il est parfois possible d’être relaxé pour certains de ces faits reprochés si des incohérences existent dans l’enquête, notamment lorsqu’on s’intéresse au procès verbal rédigé par les keufs. Ce mois-ci une personne a été relaxée pour « participation à…en vue de » justement pour cette raison. Sur la question de la dissimulation il arrive que des équipements soient saisis par les keufs et que cela suffise à incriminer. On remarque néanmoins que le simple fait de trouver un masque, une cagoule ou autre dans un sac à dos ne suffit pas toujours pour une condamnation. Un des procès de ce mois-ci a malheureusement vu la personne déférée être finalement condamnée pour dissimulation alors qu’une cagoule, qu’elle ne portait pas, avait été retrouvée dans son sac lors d’une fouille. L’avocat de la défense a pourtant plaider l’insuffisance de preuve. Son argument a été écarté. D’autres chefs d’inculpation ont conduit à d’autres condamnations. Il s’agit du « refus de signalétique », « refus de décliner son identité » ou encore « refus d’ADN ». Dans les cas concernés les condamnations ont été légères et sans grande conséquence pour les inculpés puisqu’elles n’ont été que financières. Nous rappelons l’intérêt de ce type de posture face à la police : l’entrave que cela représente pour la machine répressive police-justice, et le fait que l’on ne soit pas ajouté aux multiples dossiers de fichage.

 

  • Les condamnations: sur la dizaine de procès d’octobre aucun n’a conduit à de l’emprisonnement ferme. En revanche tous ont vu tomber des amendes, parfois lourdes, souvent permettant d’augmenter la paye de certains keufs… Certains d’entre eux se portent « partie civile » ce qui leur permet d’engranger mois après mois un joli pactole. Ce mois-ci une inculpée à été condamnée à verser 800 euros à un keuf qui a joué ce petit jeu infame. Elle était inculpée pour « refus d’ADN », « participation à…en vue de » et « violence sur pdap ». En plus des 127 euros qu’elle a dû verser comme tout le monde pour les « frais de fonctionnement » de la justice, elle a aussi été contrainte de verser 600 euros à l’avocate du keuf en question. Si l’on cumule la totalité des amendes des procès que nous avons suivis ce mois-ci on arrive à plus de 2500 euros. Un certain nombre de sursis sont aussi tombés, ainsi que des heures de travaux d’intérêt général (TIG). Quelques personnes ont aussi été interdites de manifestation à Toulouse, et une personne a également été interdite de séjour à Toulouse le samedi jusqu’à son procès. Dans ce dernier cas, le report demandé a été accepté. Autre pratique que nous recommandons : le refus de la comparution immédiate. Trois inculpés ont demandé le report de leur procès afin de pouvoir mieux s’y préparer et ils l’ont obtenu.

 

  • Les remarques des magistrats de l’accusation : certaines remarques permettent de voir à quel point il existe une complicité entre les keufs et les magistrats. Ces derniers présentent les flics comme des « victimes » des violences des manifestants et rappellent leur fatigue, voire leur épuisement (youpi !). C’est aussi de cette manière qu’ils empochent des thunes. Pathétique ! Lorsque du matériel de protection (masque, lunettes, gants, etc…) est retrouvé dans un sac ou sur une personne lors d’une fouille, le procureur, le juge ou l’avocat des keufs parle de « l’attirail du casseur ». Ce sont souvent ces éléments sur lesquels les magistrats s’appuient pour motiver le chef d’inculpation « participation à…en vue de ». Enfin, dans un des procès de ce mois-ci, le procureur à justifié l’utilisation de gaz lacrymogènes par les keufs en parlant d’une « foule hostile » n’ayant rien à voir avec de « simples manifestants ». On comprend bien le paysage mental dans lequel les magistrats se trouvent pour pouvoir affirmer des choses pareilles. Pour eux, les keufs ont raison, un point c’est tout. Malgré tout cela, certaines remarques, voire certaines prises de position de camarades inculpé-e-s montrent qu’il est encore possible et parfois efficace de tenir tête à l’appareil judiciaire et ainsi d’établir un rapport de force qui gêne la répression.

 

  • Remarques et prises de position des inculpé-e-s : parmi les quelques interventions qui font bien plaisir on se rappellera le « refus par principe » de donner son identité, son ADN ou encore de se soumettre à la signalétique (photos et empreintes). En plus de cela on se souviendra de l’évocation du caractère « liberticide » de la loi anticasseur évoquée par une inculpée, ainsi que l’affirmation de la légitimité à manifester et à exprimer sa colère dans le climat politique, social et économique actuel. La demande de report de procès (refus de la comparution immédiate) lorsqu’il a été demandé et accepté s’est aussi fait de manière ferme et sans courbette, ce qui montre que nous sommes en droit de s’opposer à la justice mais surtout que cela est possible et peut être profitable. Enfin, on regrettera certaines défenses de profil qui ont conduit certains et certaines à se dissocier du reste des manifestants en mettant en avant une situation personnelle, professionnelle notamment, qui les valorise. On sait, par expérience, que ce type de défense ne mène que rarement à la relaxe et qu’il ne possède donc aucun intérêt particulier.

 

 

C’est tout pour ce mois-ci !

Merci de nous lire et de partager.

 

La Défense Collective de Toulouse.

 

 

 

 

 

[1] Sous réserve d’avoir manqué des procès dont nous n’avons as eu connaissance.