Comparutions à la suite de manifs Gilets Jaunes : semaine du 20 au 24 Mai

Le 21, grosse journée, dans 2 salles différentes.
Dans une salle ne passeront presque que des GJ, dans l’autre, une seule passe au milieu d’autres affaires.
Commençont par celle là, un cas un peu particulier (elle ne comparait pas libre car emprisonée suite à un jugement pour une autre manif, tou.te.s les autres ont eu des reports avec ou sans cj mais sans maintien en detention) :

 – A. H.
“A. était jugée le 21 mai (après avoir demandé un report pour préparer son procès) pour complicité d’outrage, complicité de menace de crime ou délit et complicité de provocation non suivie d’effet, à l’encontre d’une personne dépositaire de l’autorité publique, ainsi que de diffusion de procédés permettant la fabrication d’engins de destructions. 
Dans les faits, d’avoir publié sur facebook des photos de flics qui seront commentées par d’autres gens, qui eux ont pu être outrageant ou menaçant (encore que ça se discute). Elle publie aussi le lien d’une vidéo qui explique comment construire un truc incendiaire avec un aérosol, même si il semble que personne n’ai vu la vidéo et ne sache réellement ce qu’elle propose. 
Elle semble surtout jugée pour avoir proposé de divulguer des noms et adresses de policiers, bien que aucun des chefs d’inculpations n’y fasse référence, et pour tenir des pages facebook anti-répression et anti-police. 
Elle est également assimilée à la mouvance d’ultra-gauche (« vegan »), ce qui est toujours un handicap dans un procès. (La proc dit que « on est loin des poètes anarchistes et de Brassens », qui eux apparemment avait le droit de détester la police)
Les juges et procureur insisteront tout du long sur comment c’est dur pour un flic d’avoir sa tête sur les réseaux, en oubliant que c’est tout à fait autorisé de les photographier dans l’exercice de leur fonction…
Le rendu est très rapide et difficile à comprendre car le juge parle bas et vite. Le tribunal se déclare incompétent sur un fait, mais pas clair lequel. Il y aurait une relaxe partielle sur la complicité d’outrage.
Elle écope de 7 mois, dont 5 de sursis. Elle est déjà en détention pour une autre affaire (6 mois) et le mois de préventive qu’elle a fait compte dans sa peine (selon le juge) ce qui fait que avec les remises de peine, elle devrait rester à peine plus que sa peine initiale. 
Le parquet n’a quand même aucun soucis à mettre des gens en prison pour des publications sur internet, et soyons honnête, des opinions politiques. La liberté d’opinion s’arrête au racisme et à l’islamophobie, les flics, pas le choix que de les aimer.
On apprend au cours du procès l’existence d’un cellule de veille sur les réseaux sociaux, on peut donc s’attendre à ce que les procès de ce genre se multiplient. Faites attention à ce que vous publiez,  protégez vos comptes, n’oubliez pas que vous êtes surveillés ! « 
Le 23, à nouveau de nombreux procés (dont 3 auxquels nous n’avons pas pu assister)
– M. S. (ne se sera pas présenté à son procès, il n’a pas d’avocat).
Il est accusé de violence sur personnes dépositaires de l’autorité publique (3 BACeux) n’ayant pas entraîné d’ITT, de dissimulation
volontaire du visage, de port d’arme de catégorie D (qui constitue une infraction autonome).
Il a été interpellé en suite de la manifestation du 20 avril, vers 17h. 
Les 3 PDAP l’ont identifié comme étant l’auteur de jet de billes en leur direction, l’ont poursuivi, rattrapé, et interpellé. En garde à vue, il reconnaît sa présence sur les lieux et être propriétaire des objets en sa possession (9 fourchettes et un couteau, des billes). Il nie en revanche son intention de projeter les billes sur les flics, il explique avoir récupéré les billes le jour même et vouloir les donner aux enfants de sa compagne. 
Il a plusieurs antécédents (14 mentions sur son casier), pour vol et port d’arme. 
Il est sans profession, n’a pas de ressources hormis le RSA, il vit en caravane.
Les 3 flics se sont portés partie civile. Ils demandent chacun 800 euros de dommages et intérêts pour le préjudice moral. 
Le procureur argumente en la défaveur de M. S pour son non respect du contrôle judiciaire, au vue de la récidive de port d’arme, et requiert 150 euros d’amende pour la dissimulation de visage, et 6 mois de prison.
Le juge déclare M. coupable, et son verdict suivra la proc : 6 mois fermes, 150 euros d’amende, interdiction de manifester à Toulouse pour la durée de 2 ans, interdiction de port d’arme pour 5 ans, et 500 + 200 euros de dommages pour chacun des flics (donc x3).
Pour info, un des 3 BACeux (présent aux procès), se porte partie civile sur 4 affaires dans l’après-midi (3 GJ et une
affaire de cambriolage). Il se sera fait plus de 2000 balles dans l’aprèm. 
Un autre est partie civile sur 2 affaires, un peu moins de 1000 balles dans l’aprèm.
– M. B., présent 
Il est accusé de violence sur PDAP n’ayant pas entraîné d’ITT, de rébellion, de dissimulation volontaire du visage. 
Il a été interpellé en suite de la manifestation du 20 avril vers 17h. Lui sont reprochés des jets de projectiles (palets de lacrymo) en direction des flics. Il reconnaît sa présence en manifestation, les jets de projectiles, mais explique avoir voulu jeter les palets vers le canal pour arrêter les gaz, et non vers les flics.
Il portait un casque, une écharpe, un masque, et avait des bouteilles en verre vides dans son sac. Il dit avoir simplement bu des bières avec ses amis et avoir gardé les déchets dans son sac pour les jeter plus tard, et nie avoir  voulu s’en servir comme projectile. 
Il explique avoir fui et s’être débattu par peur, et avoir eu une réaction violente car un des flics lui a fait une clé de bras lors de son interpellation. 
Le juge l’interrogera principalement sur tout le déroulé de la manif, sur son point de vue sur les incendies, les jets de projectiles, etc.
La défense consiste principalement à mettre en avant la transparence de M., son absence de mauvaises intentions : « M. reconnaît les faits, il est sincère ». Défense molle.
La procureur requiert un mois de sursis, 150 euros d’amende pour dissimulation du visage, une interdiction de manifester de 2 ans, et un stage « valeurs républicaines » obligatoire et à ses frais !
M. travaille comme éducateur dans le social, dans le milieu du handicap, en CDD actuellement.
Le juge déclarera M. coupable, le condamne à 1 mois de sursis, 150 euros d’amende, et à une interdiction de manifester pendant un an à Toulouse.
Pas de mention de ceci sur son casier judiciaire pour ne pas le pénaliser dans son travail.
– M. E, absent de son procès 
Il est accusé de participation à un groupement en vue de commettre des violences et/ou des dégradations, de violence sur PDAP n’ayant pas entraîné d’ITT, de dissimulation volontaire du visage.
Il a été interpellé en suite de la manifestation du 20 avril vers 17h.
L’avocat demandera la levée du contrôle judiciaire, car M. a des difficultés matérielles à se déplacer. 
Il portait une écharpe, et sera retrouvé dans ses affaire un gant brûlé. Il aurait été identifié comme étant l’auteur de jet de projectiles (des palets de lacrymo).
Un flic se porte partie civile et demande 800 euros de dommages. 
Le procureur requiert 3 mois fermes, interdiction de port d’arme pendant 5 ans, interdiction de manifester pendant 2 ans à Toulouse.
Il a plusieurs antécédents avec 13 mentions sur son casier judiciaire, pour vol, trafic de stupéfiants, a déjà pris du ferme.
Verdict : 400 euros de dommages pour le flic, et pour le reste, la personne présente n’a pas pu bien entendre. Du ferme quasi pour sûr, et de l’interdiction de manifester et de port d’arme.
– M. B, présent à son procès, 
Il est accusé de violence sur PDAP n’ayant pas entraîné d’ITT, de participation à un groupement en vue de commettre des violences et/ou des dégradations, et de dissimulation volontaire de visage. 
Il a été interpellé en suite de la manifestation du 20 avril vers 17h.
Deux BACeux se sont portés partie civile, il y a une vidéo qui confirmerait leurs accusations. Ils demandent tous deux 800 euros de dommages et intérêts. 
Il aurait jeté des palets de lacrymo en direction des flics, et portait une écharpe et un gant (brûlé). Il reconnaît les actes, mais pas la direction du jet du projectile : il visait le canal. Il s’excuse platement et directement auprès du baceux, il dit être pacifiste, et faire preuve d’empathie : il est possible qu’il ait mal visé, que le palet ait atteint les flics bien que ça n’ait pas été son intention, et comprend que le flic ait pu être heurté par le geste. 
M. travaille dans une entreprise, est en CDI.
La proc requiert 3 mois de sursis, 150 euros d’amende, interdiction de manifester pendant 2 ans et 5 ans d’interdiction de port d’arme. 
L’avocate plaide la relaxe pour tous les chefs d’inculpation : la dissimulation du visage est en vérité légitime dans la mesure où il l’a fait à partir du moment où il y avait des gaz, et il est légitime de vouloir s’en protéger. Elle évoque l’acharnement judiciaire sur les GJ.
De plus, au moins un des BACeux n’était pas visé car c’est l’un des deux qui tenait la caméra qui a filmé la scène. Défense dynamique et franchement bien menée.
M. est malgré tout reconnu coupable par le juge, condamné à 2 mois de sursis, à 150 euros d’amende, à une interdiction de manifester d’une durée d’un an sur Toulouse, à une interdiction de port d’arme de 5 ans, ainsi qu’à 400 euros de dommages à un seul des flics (le baceux qui ne tenait pas la caméra).
La proc aura été particulièrement méprisante tout au long de l’après-midi, « on n’arrive pas avec un tel accoutrement en
manifestation », « bizarrement les gilets jaunes perdent toujours un gant avant la manifestation », « quand on arrive avec de quoi se
dissimuler le visage et des gants, c’est pour casser et pas pour autre chose », et j’en passe.
Elle souffle, grimace, lève les yeux au ciel, se fait d’ailleurs reprendre par une avocate sur le fait qu’elle doit garder le silence le temps de sa plaidoirie, y compris dans ces mimiques trop expressives.
Le juge un peu moins méprisant, même plutôt doux en parole, mais finalement il suit quasi systématiquement les réquisitions de la proc.
Il insiste lourdement sur la chronologie de la manifestation que peuvent connaître les inculpés, bien manipulateur.
-M. J, présent à son procès
Il est accusé de groupement en vue de commettre des violences et/ou des dégradations, de violence sur PDAP, de dissimulation volontaire du visage.
Il a été interpellé en suite de la manifestation du 20 avril vers 17h.
Il aurait jeté des palets de lacrymo sur les flics. Personne ne s’est porté partie civile. On le reconnaîtrait sur une vidéo.
Il reconnaît les faits de dissimulation de visage (masque et lunettes), mais dans un but de protection contre les gaz, et nie avoir jeté quoi que ce soit en direction des flics. Il n’avait qu’un gant car il a simplement perdu l’autre.
M. est au RSA, il a le statut d’auto-entrepreneur.
La proc requiert 2 mois de sursis, 100 euros d’amende étant donné les faibles revenus de M., une interdiction de manifester à Toulouse pendant 2 ans, un interdiction de port d’arme de 5 ans.
La défense plaide la relaxe pour les 3 chefs d’inculpation, relève la légitimité de se protéger des gaz lacrymogènes.
Il sera jugé coupable et écope de 2 mois de sursis, 100 euros d’amende, interdiction de port d’arme pour la durée de 5 ans, et interdiction de manifester pour la durée d’un an.
– M. C, présent à son procès
Il est accusé de groupement en vue de commettre des violences et/ou des dégradations, et de dissimulation de visage.
Il a été interpellé en suite de la manifestation du 20 avril vers 17h.
Il a été filmé par des caméras de surveillance en train d’enlever son équipement (masque, lunettes et écharpe) avant son interpellation.
Il admet les faits de dissimulation du visage, dans un but de protection contre les gaz. Il regrette que le flic qui l’a interpellé (M. François) soit parti, car il aurait aimé avoir des explications sur les circonstances de son interpellation. 
Il a des antécédents : 4 mentions sur son casier judiciaire, dont du sursis, pour consommation de stupéfiant avec retrait de permis.
La proc requiert 2 mois de sursis, 150 euros d’amende, une interdiction de manifester pendant 2 ans sur Toulouse ainsi que de porter une arme pendant 5 ans.
La défense plaide la relaxe, pour des grosses incohérences sur le dossier, notamment en termes géographiques, car la chronologie des faits montre qu’il ne pouvait être là où était la caméra qui l’a filmé, puis sur le lieu d’interpellation. De plus, la vidéo ne permet pas de l’identifier formellement. Défense efficace et construite.
Le juge rendra M. coupable dans son verdict, le condamnant à 150 euros pour la contravention et 300 euros pour le délit.